Les fesses de mon caviste
Parfois apparaissent sur mon écran d'étranges photos.
Ou du moins inattendues.
Des hommes nus, j'en ai déjà vus. Oui, je vous assure...
En revanche, des cavistes - comme ceux qui travaillent dans mon quartier - plus rarement. Après les rugbymen, après les boulangers, après les charcutiers... voilà les marchands de vins à poil pour un calendrier.
Pas de quoi fouetter un chat.
C'est un calendrier.
Un de plus.
Et des hommes nus. La vie, quoi.
Sauf que, hier, j'ai voulu acheter du vin.
Or, je refuse de me fournir dans les supermarchés. Je savoure ce moment, celui d'entrer chez le caviste. Regarder, toucher les bouteilles. Faire marcher ma machine à souvenirs gustatifs. S'extasier pour une étiquette originale. Râler pour un prix trop élevé. Discuter surtout avec lui (c'est rarement UNE caviste au passage...).
Lui faire confiance, repartir avec son coup de cœur en lui disant "de toute façon, si ce vin n'est pas bon, je reviens pour un remboursement immédiat".
À ce jour, je n'ai jamais mis à exécution cette petite menace.
Il faut toujours faire confiance à son caviste et ne pas lui tirer dessus (en revanche, je vous conseille très fortement de lire "Tirez sur le caviste" de Chantal Pelletier).
Donc, d'un pas assuré, je me rends dans ma cave préférée.
Mais cette histoire de calendrier a tout bouleversé...
Je suis entrée, certes.
Le caviste m'a dit bonjour, certes.
J'ai parcouru les rayons. Une main glissant négligemment sur les bouteilles.
Zéro concentration. Zéro. Nulle. Cerveau bloqué.
Impossible de faire la différence entre un Bourgogne et un Bordeaux.
Et mon regard que je retenais car trop désireux de se retourner vers le caviste sur le thème " t'es dans le calendrier toi ? Ou pas ? Tu voudrais y être ? Et t'es comment derrière ton tablier de caviste".
Oui, je le tutoie le monsieur. Dans ma tête. Pas en vrai.
Lecteurs de ce blog, je vous entends. Je vous entends dire : " Ca y est, Eva fantasme sur le caviste". Non. Enfin...
J'imagine seulement. Je rêvasse.
Une minute ou deux. Dix maximum.
Il a bien fallu que je revienne à la réalité.
J'ai acheté son coup de cœur.
J'ai payé sans même le regarder, les joues rouges... Incapable de me départir de ces photos d'hommes nus trottant dans ma tête... J'ai même pensé l'espace d’une seconde évoquer ce calendrier avec lui. Mais la seconde est très très vite passée.
Il me tendait déjà mon paquet.
"Pourvu qu'il ne lise pas dans mon esprit".
Il me restait à sortir. Un tout petit pas pour moi. Un grand soulagement pour ma tête.
Que nenni.
Car à cet instant, mon regard a été capté par une autre nourriture terrestre. Un paquet d'immenses gressins, bien ronds, bien longs.... Et l'envie fulgurante d'en grignoter quelques-uns. "Non, ce n'est pas phallique. Ne pense pas à ça" me disait une voix intérieure à l'esprit tordu.
Trop tard.
Je ne pensais qu'à ça.
J'ai pris le paquet. Les joues écarlates. Brûlantes.
Je ne l'ai pas regardé. Le caviste.
Enfin, juste un coup d'œil furtif.
Simplement pour voir s'il souriait.
Il souriait...
Faut vraiment que je parte....
De retour chez moi, je me suis jetée sur le calendrier, histoire de voir si je reconnaissais mon caviste. Le mien.
Non. Il n'était pas là. Ni au mois de janvier, ni à juillet. Pas de photo du caviste de la rue d'à côté non plus.
Parce que les hommes nus sur papier glacé sont... Londoniens. Et Londres, c'est pas Paris... Trop loin de moi.
Heureusement. Je pourrai retourner acheter du vin.
Malheureusement. Je pourrai retourner acheter du vin.
Merci Laure Albernhe pour avoir déposé sur mon compte Facebook les photos de ce calendrier. Je ne sais toujours pas si tu as pensé à moi pour le vin, ou... le vin.