Taxi driver

par roqueeva  -  11 Février 2014, 21:16

Taxi driver

Je ne voulais pas écrire ce billet.

Je sais d'avance ce qu'il va se passer. Je vais m'énerver. Mon coeur va palpiter, mes joues se colorer d'une colère rouge alors que les péripéties des deux derniers jours ne devraient être qu'un lointain souvenir.

Mais, à Luchon (et à Paris, aucun décalage horaire n'ayant été constaté), il fait nuit noire. Froid. Le bar est fermé. Il est bientôt 22h30 et j'ai oublié mon roman chez moi. Tant pis pour vous, tant pis pour mon rythme cardiaque qui va s'accélérer au gré des phrases.

Et puis un commentaire sur Facebook m'a un peu poussé à écrire...

 

PREAMBULE

- Je suis pour le droit de grève

- Je suis pour la liberté d'expression

- Je suis même prête à supporter les emmerdements quand le combat est juste (reste à définir le mot "juste", je le concède).

- J'aime les taxis. Quand je dis "j'aime les taxis", je parle du moyen de locomotion. Pratique. Surtout à Paris (à Nice, c'est une autre histoire...). Parce que les chauffeurs, c'est comme dans la vie. Y'a ceux qui sont sympas, ceux qui te saoulent, ceux qui te draguent lourdement, très lourdement ("Vous savez pas quoi ? L'autre jour, y'a une cliente qui m'a proposé de payer en nature... C'est fou non ?" Anecdote véridique évidemment), y'a des cons aussi, des bavards, des fans de RMC, des fidèles de TSF...

 

FIN DU PREAMBULE

Voilà, j'aime les taxis. Traverser Paris la nuit, le nez à la fenêtre et m'extasier avec un enthousiasme parfois démesuré sur la beauté de cette ville.

Enthousiasme parfois réfréné par le montant s'affichant sur le compteur, mais c'est la règle du jeu. C'est ça ou le métro qui pue et un peu déserté passé minuit.

 

Lundi matin, les taxis étaient très en colère contre les VTC, les gens qui font du co-voiturage, sans doute aussi contre leurs patrons qui les exploitent... DONC, grève des chauffeurs qui ont bloqué en deux-trois mouvements le périphérique, et par un effet de domino logique, tout Paris.

Je le savais, mais évidemment, idiote que je suis j'ai pris ma voiture pour aller travailler. Soit 6,5 km si j'en crois Mappy. Et habituellement 20 minutes de trajet maximum. 

Sauf lundi. Partie à 8 heures. Arrivée à 9h20. Un lundi. Jour de bouclage. Quand vous visionnez dans votre tête un amas de papiers à gérer sur votre bureau. 

A 9h20, LUNDI, j'étais énervée. Contre les taxis. Contre moi aussi (pauvre cruche, t'avait qu'à prendre le métro). Deuxième effet domino : je fus exécrable toute la journée.

Et j'ai pris un taxi le soir pour rentrer chez moi.

A minuit, ils n'étaient plus grévistes.

J'ai traversé Paris, le nez collé à la fenêtre, m'extasiant sur la beauté de Paris, la nuit. Parce que même après 18 heures d'énervement, c'est toujours beau Paris, la nuit.

 

A minuit trente, j'ai réservé un taxi pour ce matin, 8h15. J'ai redemandé dix fois à la dame l'heure et la date de réservation. J'ai reredemandé si une grève n'allait pas refaire surface. J'avais calculé assez large pour arriver à Orly une heure avant mon vol pour Toulouse afin d'atteindre Luchon. Décidée à ne pas louper mon avion. Sinon... Sinon c'était la merde.

Une petite inquiètude a surgi quand j'ai entendu à la radio que des chauffeurs reconduisaient leur mouvement. Mais après avoir bloqué une partie du périph, ils avaient déjà levé le barrage. Ouf.

 

A 8h15, taxi driver est arrivé. C'était pas Robert de Niro. Qu'importe. Un truc collé dans l'oreille pour parler avec ses collègues. Un grand sourire qui s'est pourtant immédiatement effacé de son visage quand il a vu mon sac. Pas mon sac à main. Mon sac de voyage.

-"Vous allez où ?"

- "A Orly".

- "Ah ça va pas être possible".

- "Allez, arrêtez de me faire des blagues. Faut y aller là"

- "C'est pas une blague madame (il a déjà mis mon sac dans le coffre...). Ils vont me casser la voiture, crever mes pneus, me jeter des oeufs..."

 

Assise dans le taxi, je crois à une plaisanterie. 

Pas du tout.

En fait, je suis dans un taxi qui ne veut pas m'emmener à Orly. ON FAIT QUOI BORDEL ? Parce qu'évidemment, la grande et la petite aiguilles de ma montre, elles, elles galopent.

Je comprends donc qu'il y a les grévistes et les non grévistes. Et que tout ce petit monde se met sur la gueule. Pendant que les clients, eux, essayent de comprendre la situation. Enfin, moi, en particulier. Me disant "c'est pas cool si on lui crève les pneus. On pourrait avoir un accident". Tout en ne comprenant pas réellement comment quelqu'un pouvait crever des pneus à une voiture en marche. Mais bon... Admettons.

 

ON FAIT QUOI ?

Taxi Driver se met alors à appeler des copains  (je précise que ce monsieur était très gentil, mais que j'étais quand même très énervée) : "dis tu pourrais me prêter ta caisse, faut que j'amène la cliente à Orly. Ben sinon, elle va louper son avion la petite dame".

L'idée était donc d'emprunter une voiture normale pour m'accompagner (je vous ai dit qu'il était gentil le monsieur). Bonne idée mais un peu compliquée surtout que nous sommes au même moment coincés dans les embouteillages du matin.

Sans compter qu'avec mon esprit mal tourné, j'ai pensé "si on prend une voiture normale, pas de compteur. Si pas de compteur, combien il va me demander ? Et s'il exige un paiement en nature ? Ah non pas question"...

 

Devinez la suite...

Agacée (euphémisme), je lui ai demandé de me jeter à Montparnasse pour prendre un bus Air France. 

- "Vous êtes sure madame ?"

- "Non je ne suis pas sûre. Je ne suis pas sûre d'arriver à l'heure. Je déteste vos cons de confrères qui pourrissent la vie de tout le monde et une profession. Donc, accélérez, déposez moi à Montparnasse".

40 minutes plus tard, il m'a déposé à Montparnasse (pas au bon endroit d'ailleurs, histoire d'alimenter mon énervement). 35 euros au compteur. 

Vite.

Vite j'ai couru (avec mon sac + l'ordi + un sac de voyage de 21 kg dixit la machine à peser les bagages). 

J'ai vu le bus partir. Forcément. Sinon c'est pas drôle.

Devant moi, un taxi gréviste a voulu frapper un taxi non gréviste (je jure que tout cela est vrai) dont la cliente ouvrait des yeux effarés, recroquevillée sur le siège arrière. Ce n'était donc pas une blague...

Un autre bus est arrivé 10 mn après.

12 euros le billet.

Et 20 mn de trajet pour arriver à Orly.

Personne n'a crevé les pneus du bus. 

Devant l'aéroport, des taxis déposaient des clients et en prenaient d'autres.

Je n'ai pas vu un jet d'oeuf (parce que je n'en avais pas dans la main, sinon c'était un massacre de poussins), ni même une altercation entre deux chauffeurs. 

Tout était calme. Sauf moi.

Enervée. Enervée de m'être énervée. Enervée d'avoir été prise pour une conne (quand même un petit peu...). Enervée contre les taxis. Même les gentils.

 

PROLOGUE

- Je suis arrivée avec 30 mn d'avance. 

- J'ai testé la machine "tu mets toute seule comme une grande ta valise dans une machine en priant que ton sac ne se retrouve pas à Tokyo". Gros scanners rouges tout moches ou jolis hôtesses ? Les compagnies ont choisi. Dommage.

- J'ai bu un café, testé les 15mn de wifi gratuit de l'aéroport

- Parcouru Libé

- Me suis jurée ne pas écrire un billet sur mon énervement matinal. Me rappelant au passage que j'avais toujours refusé d'user des services d'un chauffeur privé (Uber et consort). Mon côté "gauche bobo" sans doute. La défense des petits artisans, d'une profession...  

 

Mais j'ai écrit ce billet... 

 

 

 

 

 

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B
Merci pour les petits artisans pas facile tout les jours mais je voie que cela te fais du bien d'être au calme a Luchon
Répondre
G
Ils se font taxer un costard !!! ;-)
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E
Garance ! :-) Je t'offre le rire que je viens de faire résonner dans Luchon !