33 000 coureurs, 21 km, 60 000 litres de sueur, 100 000 oranges… et moi
« Alors heureuse ? » m’a dit un type 30cm après la ligne d’arrivée…
Comment dire…
Heureuse n’est pas le mot exact.
Je n’ai pas eu d’orgasme pendant ces 2H10.
Et si le monsieur pouvait ne pas me parler, ce serait mieux. Je n'ai pas envie de parler. J’ai envie de m’écrouler. Mais même ça, je n'ai plus la force.
Mon cerveau n’est plus connecté à mes jambes. Dichotomie totale entre l’esprit et le corps. Je ne suis pas sûre, par ailleurs, d’avoir pensé pendant ces deux heures de course.
En revanche j’ai compté. Compté le nombre de kilomètres, de minutes, parfois même les pas, les ravitaillements…
Parce que cette aventure du semi-marathon, ce fut :
6 billets sur le blog, sans compter celui-ci.
Une quinzaine de tweets (une trentaine ? Cinquante ? Non… 100 ? Vous exagérez) pour évoquer ce défi et mes envies de dévorer la vitrine de la boulangerie d’à côté.
125 : le nombre d’insultes « putain de ta mère », « Bordel de merde »… émises pendant la course. Notamment au cours des 4 kilomètres qui ne faisaient pas 4 kilomètres. Mais plutôt dix à eux tout seuls. Chiffre d'insultes à multiplier par 10 pour les heures d’entraînements.
49 jours de doutes, d’effort. 49 jours où vous dites aux copains «Non, merci, je ne sors pas ce soir » parce que sinon vous savez bien ce qu’il va se passer… Dîner plus lourd que le combo soupe-compote expérimenté depuis ce 13 janvier. Que l’alcool va vous griser mais vous mettre dans le rouge le lendemain. Que les kilos dont vous essayez de vous alléger vont s’accrocher aux hanches, au ventre, aux cuisses…
30 km de vélo en moyenne dans la salle de gym où heureusement je peux en parallèle regarder la télé et me marrer avec les chroniques de Stéphane de Groodt ou Cyril Eldin le dimanche entre midi et deux.
2 à 3 sorties par semaine. Qu’il fasse beau ou pas. Nuit ou pas. Froid ou pas. Je remercie d’ailleurs Monsieur Météo qui a choisi ce dimanche 2 mars pour faire descendre le thermomètre. C’est vrai, c’est tellement mieux de courir quand il fait 2 degrés plutôt que les 10 habituels !
4 : le nombre de beignes que je vais mettre si un jour, je choppe le mec qui a fait le tracé du parcours. Vous pensiez que Paris, en dehors de la Butte-aux-Cailles et Montmartre, était un territoire plat ? J’infirme cette information. Il y a une côte, brève mais intense, au 8ème kilomètre et surtout une côté très longue au 17ème kilomètres, là précisément où vos jambes commencent à protester.
2 : deux jambes ont d’ailleurs été perdues dans Paris. Si vous les retrouvez, veuillez me les faire parvenir. C’est les miennes.
2 encore : deux acolytes de course. Deux garçons formidables que je ne connaissais que par Twitter avant ce matin. Et avec qui nous avons partagé cette aventure. Guillaume et Nicolas, vous êtes des warriors, des super mecs. Bienveillants et drôles.
Un kilo : le nombre de pâtes avalées ces derniers jours. Aux œufs ou semi-complètes. Des pâtes, quoi.
30 : les barres de céréales qui sont venues combler mon estomac criant famine au cours de ces 49 jours.
20 au moins : les orchestres sur la route. Des tas de sourires qui réchauffent (j’avais pas particulièrement froid mais quand même ça fait du bien). J’ai même failli m’arrêter pour danser une macarena. C’était pas vraiment le bon moment.
12 : les projets nés dans mon cerveau pendant les heures d’entraînement. Mes patrons à Europe 1 peuvent être soulagés, je vais me calmer. Enfin, j’ai quand même deux ou trois émissions à vous proposer...
Une demi seconde : le temps pendant lequel j’ai envisagé de m’inscrire au marathon de New York en me disant « Ca doit être super beau ». Sauf qu’avec Nicolas, nous avons constaté qu’au 17ème kilomètre, on se foutait complètement du décor. Dans notre champ de vision : nos pompes et le bitume.
2 : le nombre de chewing-gum offerts à l’arrivée par Mademoiselle Airwaves. Franchement… C’est pas de la gueule qu’on pue le plus… Message aux organisateurs : misez sur une marque déo l’année prochaine.
3 bouteilles de power machin truc que j’ai bues depuis ce matin en me disant que ça m’aiderait à retrouver mes jambes. Je vais aller en boire une petite encore…
420 : la somme, en euros, recueillie grâce à vous pour que je puisse m’épuiser sur le bitume parisien. Ou plus exactement pour l’association Grégory Lemarchal. Pendant ces heures d’entraînement et la course, je sais que j’ai pensé. A Greg, à vous. Ca vous pousse. Vous donne des ailes. Merci.
4 : le nombre d’étages – sans ascenseur – qui m’attendaient chez moi… Scénarii possibles : je vis chez ma gardienne au rez-de-chaussée pendant une semaine / je monte en rampant. Avec la moquette, ça devrait le faire / Je m’arrête au deuxième chez le voisin.
1026 : Ma place dans la catégorie… vétérante. Comme dirait mon ami Nans, avec son accent du sud : « Enculés ! ». Je ne me suis jamais inscrite dans cette catégorie. Certes, j’ai été obligée de donner mon âge. Et hop, une touche sur l’ordinateur qui vous renvoie à une réalité que vous essayez de nier…
15 jours : la période nécessaire pour que je me remette de cette épreuve, bande de fous !
Une heure et 10 minutes : le temps entre le premier et la vétérante que je suis. Oui, et alors ? Il est heureux, lui ?
PS : Y’a une chose que je ne suis pas parvenue à compter, c’est vos messages d’encouragements. Mais ils sont tous là, dans un petit coin de ma tête