Du jazz, des voix, un 6 juin
6 juin 2014
5h30 ce matin. Se lever. Allumer la radio. Entendre les premiers témoignages de la journée. Les mots de ces hommes qui 70 ans avant, à la même heure, s'apprêtaient à débarquer sur les plages de Normandie. Les corps transis par l'eau glaciale. Et la peur.
La peur. L'inconscience aussi. Et ce besoin de témoigner. De communier. De transmettre aux générations d'après leur histoire. La nôtre. Ce matin, les anciens combattants parlaient, et personne ne riaient. Leur passé devenait notre présent. Jamais les paroles de ces femmes et de ces hommes ne m'étaient apparus aussi nécessaires. Question d'époque sans doute.
Vers 8 heures, de la radio est sortie une autre voix. Plus aigüe que je ne l'imaginais. Sans doute par l'émotion encore. Didier François reprenait du service à Europe 1. Quelques semaines seulement après sa libération, lui l'ancien otage en Syrie. Lui qui a vécu des guerres, ces conflits des temps modernes.
70 ans ont passé. La mort est toujours là. Et les hommes continuent de témoigner. Autrement. Avec un même leitmotiv : ne pas oublier.
Ce matin à travers les ondes, les événements se téléscopaient. Le temps s'intensifiait.
Au gré de la journée, les mots et les images se sont entrechoqués sur les écrans de nos vies. Les visages de ces hommes baignés de larmes. Le ciel bleu, trop bleu, en ce jour de commémoration. Les puissants. Les enfants. Le sable. Et la mer calme.
Dans ce flot d'informations, un article est arrivé comme un sourire. Une pastille. On écoutait quoi à la radio en 1944 à part la voix de De Gaulle ? Quels artistes donnaient envie aux auditeurs d'esquisser quelques pas de danse dans une cuisine ou un salon... ?
Certains chantaient Le petit vin blanc, d'autres Rum and Coca-Cola des Andrews Sisters.
A Paris, dans les caves, les zazous, habillés comme des Américains, célébraient la liberté. Du swing, du jazz. Et une volonté de non-conformisme. Façon de dire "plus jamais ça". Vian écrivait ses premières critiques dans Jazz Hot. Glenn Miller donnaient ses derniers concerts.
Outre-Atlantique, Le Métropolitan Opera de New York offrait la première fois sa scène à 7 géants du jazz : Louis Armstrong, Coleman Hawkins, Lionel Hampton, Art Tatum, Oscar Pettiford, Billie Holiday et Mildred Bailey...
Aujourd'hui, dans ma tête résonnait, les témoignages des Hommes de 1944, la voix de Didier François et des notes bleues salvatrices.