Nina & Olivier
Il est là. Posé sur la table basse.
J'ai longtemps tourné autour. Je ne voulais pas. Je ne voulais pas ouvrir "En attendant Bojangles" d'Olivier Bourdeaut, parce que :
1. Parce que Mr. Bonjangles, c'est Nina Simone. Et pas touche à Nina. Surtout si c'est pour se réapproprier le titre en le bousculant, l'abîmant.
2. Parce que la couverture est esthétique, classe. Malin l'éditeur. Mais si tu crois que tu vas me chopper avec un joli dessin, c'est mal me connaître.
3. Parce que l'auteur, Olivier Bourdeaut, est trop beau. Trop beau pour que tout ça soit vrai. Monsieur l'éditeur, vous pensez vraiment que je n'ai pas compris votre petit jeu ? Vous cachez l'authentique auteur, n'est-ce pas ? Avec son physique disgracieux, la promotion aurait été impossible ? Je vous soupçonnne d'avoir organisé un casting afin de trouver un garçon sublime capable de bien parler de ce livre qu'il n'a pas écrit. Avec ce regard à la Kaa nous sussurant à travers l'écran "Aie confiance....".
4. Parce que quand toutes les critiques sont dithyrambiques et que les prix s'accumulent sur la cheminée du "faux" auteur", un voyant rouge s'allume dans mon cerveau. "N'y touche pas, tu vas être déçue".
Donc, le livre n'a pas bougé.
J'ai tourné autour. L'ai ignoré. Méprisé.
INCISE
Deux solutions s'offrent à nous.
Soit je n'ai pas ouvert et le livre, et vous allez vous dire "mais elle est dingue. Ca sert à quoi ce post ?".
Soit j'ai ouvert le livre, et vous allez me dire "bon alors ? C'est bien ou pas ?"
Je l'ai ouvert. Evidemment. Parce que :
1. Nina Simone. Qui peut emprunter une chanson de Nina Simone ? J'ai enclenché le titre, fonction "repeat". Pour que la voix de Nina accompagne chaque page qui se tournait.
2. La couverture. Je sais, ça veut rien dire une dessin sur une première page. Mais Monsieur l'éditeur me connaît bien. J'ai cédé aussi en m'arrêtant sur cette illustration de Valeriy Kachaev que je ne connais mais que j'aime beaucoup.
3. Olivier Bourdeaut. Ce garçon parle bien. Très bien même. J'ose croire à sa sincérité, à son histoire de romancier né sur le tard dans une chambre de chez son frère. Et puis, avec son regard façon Kaa, l'hypnose a fonctionné.
4. Parce que Nicolas Carreau qui chronique des livres sur Europe 1 m'a dit que le livre était très bien. Nicolas Carreau est un homme de goût, qui s'incruste parfois dans mon cerveau et sait par avance ce que je vais aimer ou pas. Et parce que Nicolas Carreau est le premier critique que j'écoute, j'ai ouvert "En attendant Bojangles" avec la voix de Nina Simone résonnant dans la pièce.
Un couple qui s'aime éperdument. Un garçon qui aime éperdument ses parents. Dans leur monde, il y a des tas de mensonges. Des histoires inventées plus exactement pour enjoliver le quotidien. Il y a aussi Mademoiselle Superfétatoire l'oiseau exotique de la famille, Monsieur L'Ordure, le copain de la famille. Il y a des verres de vodka, des cocktails et Nina Simone. Et cet air sur lequel la famille danse...
VERDICT
Un éloge de la folie bouleversant.
Une danse des sentiments. Ca tournoie, ça virevolte.
Un brin de mélancolie.
De l'allégresse, du charme et une douce nostalgie qui enveloppe, rassure.
Il est 15 heures. Mr. Bonjangles envahit toujours la pièce.
Olivier Bourdeaut a dessiné sur mon visage un immense sourire
Et n'avoir pour seul regret que cette histoire s'arrête après seulement 159 pages exquises...