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Le blog d'Eva Roque

Les yeux de Sarah

Les yeux de Sarah

J'aime sa curiosité, son écriture, ses points de vue, son humour. J'aime ce garçon pour son sourire, son goût pour les nourritures terrestres. Alors j'ai sauté avec gourmandise sur ses mots quand j'ai reçu sa bafouille. Un texte inattendu. Réjouissant. Emouvant.

Merci Stéphane

 

La bafouille de Stéphane (@smejanes)

 

LES YEUX DE SARAH

Autour de moi, on n’aime pas la boxe. Ce serait même le « sport le plus con du monde ». Se balancer de grandes mandales dans la gueule sans vraiment se détester, ça heurte le sens commun.

Moi, j’aime la boxe. La regarder en tout cas. Certes, je me sens un peu voyeur d’un spectacle toujours violent. J’ai peur, j’ai mal. Je sais aussi les destins brisés, les morts prématurées, les séquelles physiques irréversibles. J’ai pleuré en regardant Mohamed Ali allumer la flamme des Jeux Olympiques d’Atlanta 1996, colosse tremblant de tout son être, abeille piquante devenu papillon fragile. Et pourtant, j’aime la boxe. L’abnégation à l’entraînement, les sacrifices, la capacité à encaisser les coups, l’art de l’esquive, la rapidité des enchaînements, le coup d’œil, la puissance, le punch dévastateur qui éteint la lumière plus sûrement qu’un coup de foudre. Non, décidément, j’aime la boxe.

Depuis le début des Jeux Olympiques de Rio, je l’aime davantage.

La faute à Saïd Bennajem, ancien champion, patron du Boxing Beats d'Aubervilliers et consultant enthousiasmant de la superbe Team Canal+. La faute surtout à l’équipe des France et à ses six médaillés. Du gamin Sofiane Oumiha au géant Tony Yoka, du capitaine Souleymane Cissokho au ch’ti Mathieu Bauderlique, et tous les autres. La vraie France Black-Blanc-Beur de jeunes athlètes qui ne gagnent pas des millions, ont les deux pieds dans la vraie vie, en quête d’un épanouissement personnel par l’effort et la sculpture de soi. Dans un sport à jugement, je les ai tous entendus accepter les décisions, avec respect et humilité, loin des pleurnicheries puériles des nageurs ou des pistards. Dans un sport prétendument réservé aux recalés de la République, aux décrocheurs de l’Éducation nationale, j’ai entendu des discours rassembleurs d’une humanité folle, d’une intelligence rare. Dans un sport individuel, j’ai admiré le souci permanent de soutenir chaque membre de l’équipe et d’honorer la mémoire d’Alexis Vastine, leur pote parti trop tôt dans un funeste accident d’hélicoptère.

Et j’ai vu Sarah. Sarah Ourahmoune. Une grande dame de 1,58 m pour 51 kg, un concentré d’énergie et de détermination. Passée par Sciences-Po, entrepreneuse, membre du Conseil national des villes, maman boxeuse et finaliste olympique. J’ai vu les yeux de Sarah, scintillants dans un visage au sourire si doux, exprimant des émotions contenues avec des mots choisis. Pour Sarah, il faut aimer la boxe.

 

PS : Pour ce texte aussi, il faut aimer la boxe. Te dire merci, Stéphane. Pour ces mots. Et l'hommage rendu à ces athlètes qui le méritent tellement.

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